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Justice pour Kalinka


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Quatrième journée d’audience
Confusions ou mensonges ?

L’accusé se sert le verre d’eau dans lequel il se noie
Appelé à raconter la dernière journée de Kalinka, le Dr. Krombach s’est empêtré dans des incohérences.

Vendredi, pour la dernière journée de la semaine, Xavière Siméoni, la présidente de la Cour d’assises de Paris, avait choisi d’évoquer la dernière nuit de Kalinka, vue au-travers du prisme de l’accusé. Pour respecter la règle dite « de l’oralité des débats », Dieter Krombach se devait de déposer sans le secours de la moindre note. Il a donc fait appel à sa mémoire et, peut-être aussi à l’idée qu’il a de la façon dont tourne le procès.
Vingt-neuf années pleines ont passé depuis la découverte, au matin du 10 juillet 1982, du corps inerte de Kalinka Bamberski. C’est Dieter Krombach qui, vers 7 h 30, peut-être, est entré dans la chambre où dormait l’adolescente : « Je venais la réveiller », dit-il. Il a ouvert les rideaux et, dans la lumière du matin, compris « immédiatement » que quelque chose d’anormal venait de se produire.

Les écueils de la mémoire
La Cour veut tout savoir et elle invite l’accusé à remonter au dernier repas de la famille encore intacte. « Nous avons dîné tous ensemble. A l’issue du repas, Kalinka se sentait fatiguée et m’a demandé que je lui fasse une piqûre de Kobalt Ferrlecit (1). Mon épouse et moi sommes ensuite sortis quelques minutes pour promener le chien. Quand nous sommes rentrés, avant 22 h 30, Kalinka lisait dans sa chambre. Nous lui avons conseillé de dormir. Ma femme est montée dans sa chambre, moi à mon bureau. Ma fille Diana est rentrée dans la nuit, j’ai discuté avec elle dans le couloir. Ensuite, je me suis relevé pour aller aux toilettes, et Kalinka a frappé à la porte en me disant qu’elle n’arrivait pas à dormir. Je lui ai donné un demi-comprimé de Frisium (2) pour l’aider à trouver le sommeil. Puis, je me suis recouché ».
Las, si cohérente soit-elle, cette présentation est venue se heurter à quelques obstacles. Le temps tout d’abord qui, en soi, peut constituer une excuse (qui se souvient de ce qu’il a fait dans la nuit du 9 au 10 juillet 1982 ?) et rend la confusion du domaine du plausible. Cependant, la compréhension dont pourrait bénéficier le caractère aléatoire de cette déposition vient buter sur des écueils bien plus cruels.
Les dépositions de témoins, d’une part, mais aussi le caractère implacable du dossier qui, si ténu soit-il par endroits, n’en contient pas moins des éléments de nature à jeter le trouble.

Des croisements embarrassants
La version fournie par le docteur Krombach est tout d’abord venue buter sur le témoignage livré la veille par sa propre fille, Diana. Selon sa déposition, c’est elle qui a discuté avec son père alors qu’il était toilettes. Ce ne serait donc plus Kalinka. Mais qu’importe, si l’on conçoit que les souvenirs des uns puissent être altérés, cela vaut aussi pour les autres.
En revanche, restent les éléments épars du dossier d’enquête, conduite à l’époque par la police de Lindau, la ville où s’est déroulé le drame. Tant en défense qu’en partie civile, on reproche à cette enquête son côté « sommaire ». Cependant, le dossier recèle quelques pièces qui se révèlent parfois cinglantes. Ainsi, le 18 mai 1983, c’est-à-dire dix mois après le drame, un policier interroge le docteur Krombach. Encore le fait-il par téléphone… et consent à attendre que le médecin prenne le temps d’écrire les réponses à ses questions !
Fi du caractère invraisemblable de ce protocole. Toujours est-il qu’on peut supposer qu’en mai 1983, le Docteur Krombach a encore la mémoire fraîche. Ainsi, rapportées à la lumière crue de la cour d’assises, ces déclarations initiales mettent en évidence quelques distorsions, quelques « oublis », comme cette liste de médicaments administrés à Kalinka, qu’il dit avoir établie et que personne n’a jamais retrouvée. Ou le soi-diant dossier médical de l’adolescente, lui aussi disparu.
Encore une fois, tout ceci pourrait bénéficier de la circonstance atténuante que constituent les longues années qui ont passé… Cependant, le Docteur Krombach n’est pas de ceux qui admettent la fatalité. Pourtant, il le sait, l’heure est grave, et dans un incroyable numéro d’équilibriste, il s’emploie à donner le change quoi qu’il lui en coûte. Le mieux étant parfois l’ennemi du bien, à force de se corriger, il s’emberlificote, il le sent. Et dans un ultime sursaut, pour éviter de laisser croire qu’un lien puisse exister entre sa version des faits et la mort de Kalinka, il commet la bourde.

L’invraisemblable diagnostic
Alors qu’il ne fait aujourd’hui plus de doute pour personne que Kalinka est morte en s’étouffant après avoir régurgité, pressé par les questions de la Présidente qui l’accule dans ses incohérences, Krombach en arrive à l’énormité.
« D’après vous, de quoi est morte Kalinka ? », l’interroge Xavière Siméoni. Et il répond tout de go : « des séquelles du coma qu’elle avait subi en 1974 à la suite d’un accident de voiture ». Ses avocats n’en reviennent pas, brouhaha dans la salle. Mais qu’importe, Krombach insiste : « j’ai fait une thèse sur les traumatismes du cerveau ».
Alors, si elle avait voulu enfoncer le clou, la présidente ne s’y serait sans doute pas pris autrement : « En tant que spécialiste du cerveau, avez-vous fait une surveillance de Kalinka au plan neuro-cérébral ? ». « Non, c’était aux Bamberski de le faire », répond l’accusé du tac au tac. Dur, pour quelqu’un qui quelques minutes plus tôt, assurait qu’il suivait son taux de fer comme le lait sur le feu…

A.J-K


Questions sur un choix thérapeutique

Le Kobalt Ferrlecit est un complément en fer, injectable. Selon le pharmacologue Allemand cité à la barre, quand il est envisagé, un apport en fer peut s’effectuer au moyen de comprimés. La piqûre restant un moyen d’ultime recours, dans les cas graves.
Pourtant, Dieter Krombach passait d’abord par la seringue, avant d’imaginer un autre protocole : « dangereux », a relevé l’expert. Pour lui, ce médicament ne présentait pas –déjà à l’époque- toutes les garanties de fiabilité en exposant le patient à des effets secondaires.
Le Kobalt Ferrlecit injectable a été retiré de la vente en 1989.

Cruelle audition
Le docteur Krombach a été interrogé près de trois heures. Confronté aux contradictions qui émaillaient son discours rapporté au témoignages et au dossier, il a parfois eu du mal à trouver les arguments qui pouvaient ramener sa version vers une cohérence plausible.
Parfois, il est resté sans voix. Notamment à l’issue de cette question de la présidente :
« Vous dites que vous avez réveillé Kalinka vers 7 h 30. Pourquoi ne la laissez-vous pas dormir alors qu’elle a été fatiguée par une journée de sport, qu’elle s’est réveillée pendant la nuit, que vous lui avez donné un somnifère. Alors encore qu’elle est en vacances. Pourquoi ne lui laissez-vous pas faire la grasse matinée ? ».

Week-end à Fresnes
Estimant que sa situation dans le quartier pénitentiaire de l’Hôtel Dieu ne lui permettrait pas, notamment, de pouvoir se rendre à la messe dimanche matin, Dieter Krombach a demandé et obtenu, un transfert pour le week-end vers l’unité médicale de la prison de Fresnes.

(1) Le Kobalt Ferrlecit est une solution injectable, destinée à apporter du fer aux personnes, en général anémiées

(2) Le Frisium est un calmant, antiépileptique, utilisé aussi pour vaincre les insomnies


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