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Justice pour Kalinka


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Douzième journée d’audience
Un somnifère mortel

Le docteur Krombach accusé par la médecine

La médecine légale française a détruit la crédibilité des déclarations de Dieter Krombach et amoindri sa défense. Ses avocats tentent de gagner du temps pour éviter l’écueil qui se profile : la lecture de la condamnation qui a frappé l’accusé en 1997, concernant un abus sexuel perpétré contre une adolescente. Sauf à provoquer un véritable incident, ils savent ce point de passage inéluctable. L’arrivée à la barre de la seconde petite fille du docteur Krombach n’aura été qu’un piètre sursis.

Les choix « déraisonnables » du Dr. Krombach
L’anesthésie-réanimation est, dit-on, parmi les spécialités les plus subtiles de l’art médical. Jean-Louis Pourriat est aujourd’hui à la retraite, c’est donc bardé de plus de trente années d’expérience que cet expert arrive à la barre. Les anxiolytiques, les calmants, les somnifères : il connait tout des neuroleptiques et, surtout de leur incidence sur le métabolisme humain. Il est par ailleurs coutumier d’un certain franc-parler.
Après avoir attendu un an pour le signaler, le Docteur Krombach s’est souvenu avoir donné dans la nuit à Kalinka un comprimé de Frisium « 10 mg » avait-il dit en première instance, « 5 mg » croit-il se rappeler aujourd’hui : « elle m’avait demandé un calmant parce qu’elle n’arrivait pas à dormir ». Ce détail lui était revenu en 1983, quasi-concomitamment (et par un pur hasard sans doute) au moment où les légistes allemands s’apprêtaient à effectuer une analyse biologique des prélèvements opérés sur les organes de Kalinka.
Pour l’expert qui parle franc, « il est déraisonnable de donner du Frisium, même faiblement dosé à une gamine qui n’en a jamais pris ». Voilà pour le calmant. Interrogé sur le protocole de réanimation choisi par Dieter Krombach (un mélange isoptine-dopamine), au matin de la découverte du corps, Jean-Louis Pourriat est toujours aussi serein et direct : « Il n’avait aucune chance de ranimer quiconque avec ça ».
On aurait cru l’affaire pliée, d’autant que, comme son collègue de la veille(1) , il estime que l’heure de la mort est intervenue « avant minuit trente ». En clair : rien qui n’arrange les affaires de la défense de Krombach. Ses avocats vont donc devoir s’attacher à démolir ce qui les démolit. Ce sera un effondrement.

Le calmant qui énerve la défense
Soupçonnés d’être des infiltrés, jouant les Cheval de Troie de la défense au sein de la partie civile, les avocats des enfants Krombach vont se casser le mors sur le dosage du Frisium. Taraudant l’expert pour qu’il explique le lien entre le somnifère et le vomissement qui a fini par étouffer Kalinka. « Le dosage du Frisium dépend du poids de la personne. Pour une enfant de 14 ans, 5 mg est déjà une dose sérieuse. Le vomissement peut-être provoqué par un réflexe à un stimulus. Par exemple, une douleur. Endormi, le système nerveux central ne répond pas correctement à ce réflexe, et le patient avale son vomitus », explique l’anesthésiste-réanimateur.
Estimant sans doute qu’une stimulation sexuelle n’a rien à voir avec une douleur, alors que c’est de « perte de contrôle du réflexe » du point de vue neurologique dont on parle, l’avocate insiste et l’expert rétorque : « une stimulation de la sphère génitale est très réflexogène ».
André Bamberski posera la vraie question : « Est-ce que ce réflexe aurait pu être causé par un rapport sexuel ? ». « Oui, sans doute », répond l’expert. Voilà qui est dit.
Entrent alors en piste Mes. Levano et Ohayon, pour la défense de Dieter Krombach. Ils tentent, comme ils l’avaient fait la veille, de pilonner l’expert pour lui arracher un lambeau d’incertitude dans lequel ils pourraient s’engouffrer. Rien ne vient, sinon une critique –encore- par Jean-Louis Pourriat de la médecine légale allemande qu’il juge « décalée au regard de la bonne pratique ».
C’est ce levier que choisit Me. Ohayon à bout d’arguments. Il demande à l’expert s’il n’est pas « tenté d’aller dans le sens de la machine judiciaire ». Le but de sa démonstration est à peine sous-entendu : « la justice française ayant décidé d’incriminer le docteur Krombach, les médecins experts se sont acharnés à trouver des arguments contre lui », tâche-t-il en substance de glisser dans l’esprit des jurés.
La suspicion n’est pas de la plus grande finesse, car elle pourrait signifier en retour, que la justice Allemande n’ayant pas voulu de Krombach comme coupable, ses experts se sont appliqués à ne rien trouver contre lui. Mais, trêve de sémantique : le face à face est tendu. L’insistance grossière de l’avocat qui se demande à haute voix si les experts ne sont pas montés dans le train de la justice, a raison de la patience du médecin qui finit par lâcher : « vous frisez l’infâmie ». En vierge effarouchée, Me. Ohayon s’indigne. L’expert le garde sous son regard et cadre son propos : « vous êtes limite, tout de même ».
La défense a le droit de vouloir exister.

A.J-K



Maren, petite-fille sage
La défense de Dieter Krombach (à moins que ce ne soit la partie civile des enfants de l’accusé) avait fait citer Maren B., la fille de Diana Krombach et donc, petite-fille de l’accusé. Etudiante aux Etats Unis, elle a fait le déplacement pour expliquer combien Dieter Krombach était un grand-père attentif. Contrairement à une insinuation, non, elle n’a jamais vu André Bamberski rôder près de chez elle quand elle vivait à Londres. Pour le reste, elle ne sait pas grand’ chose, sinon qu’au foyer, on parlait de Kalinka comme d’une sœur.

La défense obtient un « acte »
L’expert Jean-Louis Pourriat a laissé échapper une rumeur de laboratoire selon laquelle « les prélèvements organiques opérés sur Kalinka auraient été mélangés ». Il n’a toutefois pas précisé s’il s’agissait d’une confusion de pièces, ou de mélange dans un bain fixant. Quoi qu’il en soit, Me. Ohayon et Levano ont bondi pour demander au greffier de bien vouloir « acter » le propos.
Devant une cour d’assises la « demande d’acte » est sollicitée quand un propos ou un document vient donner une note jugée importante par l’une ou l’autre partie. Avocat, procureur ou même partie civile peuvent demander que soit pris « acte » de ce qui vient d’être dit. Notons que ceci fait beaucoup plus d’effet sur les jurés que sur le Président.
D’autant qu’en l’espèce, le Dr. Pourriat a dans la même phrase fait valoir que, mélange ou pas, cela est « sans incidence ». En clair, il est amusant de laisser soupçonner que l’expert anatomo-pathologiste a pu confondre un foie et un rein, si c’est de mélange de « pièces » dont a parlé l’expert. Et si c’est de mélange dans un produit de fixation dont il est question, on a expliqué hier que le passage dans le formol d’un prélèvement avait pour effet d’en « bloquer » toutes les molécules sans contamination possible.
Enfin, un acte. Ouf !

Les fesses de l’assistante
En fin d’audience, le président a lu les témoignages de personnes absentes au procès. En l’occurrence, il s’agit des déclarations de trois personnes ayant travaillé au contact du Dr. Krombach, du temps où il avait son cabinet à Lindau. Sans grand intérêt, sinon les déclarations d’Andréa W. qui fut assistante médicale de l’accusé de 1981 à 1984. « Chaque fois qu’il passait derrière moi, il me mettait la main aux fesses. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je suis partie. Aujourd’hui, on dirait harcèlement », déclare-t-elle sur procès-verbal. Un peu avant elle a précisé pourquoi, selon elle, elle avait droit à ces « faveurs » : « j’étais la plus jeune ».

(1) Voir la chronique du 11 décembre


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